vendredi 28 août 2015

Un tandem avec Bernadette ?

En ce moment, les collaborations créatives avec des illustrateurs de talent me manquent trop ! Alors quand j'ai vu que chez Marie-France il y avait une petite foire aux tandems qui se préparait, j'ai sauté sur l'occasion !
J'ai ouvert mes cartons (qui prennent la poussière, même s'ils sont numériques !) et j'ai retrouvé ce texte écrit il y a une éternité... Souvenez-vous, j'en parlais ici ! Aujourd'hui, la petite fille pour qui j'avais écrit ce texte est une jolie jeune fille de presque 10 ans... ah là là, ça ne nous rajeunit pas ma bonne dame !
 
Alors voilà, si vous êtes illustrateur et si ce texte vous inspire, contactez-moi !
Le voici en entier pour les curieux :
 

Le sac à main de Bernadette Flanflan

 
Bernadette Flanflan ne sort jamais sans son sac à main.
Quand Bernadette Flanflan est en balade, le sac à main est de la promenade.
Et quand le sac joue les nomades, il y a toujours à ses côtés Bernadette Flanflan qui gambade.
C’est que, chaque jour de l’année, Bernadette Flanflan range dans son sac à main tous ses trésors pour ne jamais les oublier.
À l’automne, Bernadette Flanflan a placé dans son sac à main
un morceau de craie et une pièce de monnaie,
deux feuilles d’érable et trois petits grains de sable,
le flic-flac de la pluie et le tic-tac du temps qui fuit,
les doigts fourchus de la sorcière et les « ouuhhhhh » du fantôme du cimetière.
 
Bernadette Flanflan a également glissé dans la toute petite poche de son sac à main
le sourire merveilleux de Balthazar,
ainsi qu’un sentiment tout bizarre,
et puis aussi…
mais chut ! c’est un secret !
À l’hiver, Bernadette Flanflan a enfoui dans son sac à main
le souffle froid de novembre et les nuages blancs de décembre,
le bonnet rouge d’un vieux monsieur et son « oh oh oh ! » si joyeux,
les gants bleus tricotés par Mamie et le joli cadeau d’une meilleure amie,
le nez en carotte d’un bonhomme de neige et trois petits tours dans l’avion du manège.
 
Bernadette Flanflan a également caché dans la toute petite poche de son sac à main
une fève offerte par le roi Balthazar,
ainsi qu’une couronne de reine rougissant comme un homard,
et puis aussi…
mais chut ! c’est un secret !
Au printemps, Bernadette Flanflan a dissimulé dans son sac à main
quatre pétales de tulipe et un bouton de la veste de Tonton Philippe,
un coq en chocolat et le parfum sucré de Papa,
un bout de ficelle et un rêve qui s’envole à tire d’ailes,
un morceau d’arc-en-ciel né d’une giboulée et trois petites gouttes de rosée.
 
Bernadette Flanflan a également niché dans la toute petite poche de son sac à main
un brin de muguet offert par Balthazar,
ainsi que son cœur qui joue de la fanfare,
et puis aussi…
mais chut ! c’est un secret !
 
À l’été, Bernadette Flanflan a enfermé dans son sac à main
l’éclat de rire de Tatie Annick et deux ou trois notes de musique,
un bout de rayon de soleil et deux petits grains rouges de groseille,
une serviette de plage et du sable coincé dans des pages,
une bougie d’anniversaire et le ballon d’un grand frère.
Bernadette Flanflan a également confiné dans son sac à main
un baiser volé de Balthazar,
ainsi qu’un au-revoir qui désempare,
et puis aussi…
mais chut ! c’est un secret !
L’été envolé dans le ciel bleu et l’automne revenu, Bernadette Flanflan a retrouvé devant la porte de l’école Balthazar et son sourire.
Bernadette a fouillé dans son sac à main. L’éclat de rire de Tatie Annick a glissé sur les trois petites gouttes de rosée et a rebondi sur le coq en chocolat emmêlé dans le morceau d’arc-en-ciel.
Enfin, tout au fond du sac à main, au-dessous des quatre pétales de tulipe séchés et de la fève du roi mage, Bernadette a trouvé ce qu’elle cherchait.

Doucement, du bout des doigts, Bernadette a attrapé le baiser volé qui s’était enveloppé dans une feuille d’érable.
Délicatement, du bout du cœur, Bernadette a déplié la feuille rougie par l’automne et elle a déposé le baiser sur le bord de ses lèvres.
Tendrement, Bernadette a tendu ses lèvres et a offert son baiser à…
mais chut ! c’est un secret !

jeudi 20 août 2015

Ecrit en 100 % petit dodo

Il y a deux jours, dans la fraîcheur du soir, j'ai écrit les dernières lignes d'un roman commencé... il y a plusieurs mois. Grand soulagement d'être arrivée enfin à terminer une histoire sur laquelle je travaillais depuis si longtemps. Et en même temps, vague sentiment d'insatisfaction qui fait que le doigt démange sous la touche "Suppr" de l'ordinateur.
 
Le premier jet est écrit. Mais tout reste à faire encore : relire l'ensemble, une fois, plusieurs fois ; traquer les incohérences, épingler les erreurs de style et les fautes d'orthographe ; réécrire les passages qui sonnent creux ; trouver un titre aussi...

 
Je ne sais pas si je vais suffisamment croire dans ce roman pour aller jusqu'au bout avec lui (d'ailleurs, c'est quoi, "le bout" : la publication sous forme de livre vendu en librairie ? ou simplement le courage de le faire lire à des regards extérieurs ?). Ce roman a quasiment été écrit exclusivement pendant les siestes de mes filles. Ca mériterait une estampille en couverture : "écrit en 100 % petit dodo !" ! C'est pour cela qu'il a mis si longtemps à s'écrire.
 
Toujours le même rituel, généralement le mercredi après-midi, parfois certains samedis ou dimanches : coucher la "grande", puis la petite, tendre l'oreille pour vérifier qu'il n'y a pas des rires étouffés ou des petits pas suspects, se faire chauffer le café, sortir la plaquette de chocolat (très important, le chocolat), faire deux ou trois trucs de flémards pour retarder le moment de s'y mettre (du genre vérifier ses mails ou nettoyer l'évier de la cuisine), puis, enfin, ouvrir le fichier Word et, en haut de la page blanche, regarder le petit curseur qui clignote.
Les premières minutes d'écriture sont un peu laborieuses. Il faut relire le chapitre précédent, revoir les notes sur le carnet de brouillon, se rappeler de l'intrigue, et puis surtout retrouver les personnages, leur faire confiance et qu'ils vous fassent confiance. Enfin, petit à petit, les doigts se dérouillent. Ils se mettent à courir sur le clavier. J'ai oublié que j'écrivais les pensées de l'héroïne : je suis l'héroïne, j'ai onze ans comme elle, je suis sa voix, je parle en son nom, comme si elle existait.
Il arrive un instant un peu magique où je suis complètement plongée dans l'histoire. Enfin, les mots sont là, ceux-là même qui ont mis si longtemps au début à se réchauffer, à oser prendre vie sur mon écran. Dans ce moment-là, je suis surprise par ce que j'écris, car ce n'est pas toujours ce que j'avais prévu dans mon cahier de brouillon. Des faits, des émotions apparaissent, sans avoir été invités. Ils sont là, ils s'imposent d'eux-mêmes, comme des évidences. Ils viennent comme malgré moi. J'aime me laisser surprendre par cette écriture qui me dépasse et m'emmène au coeur des choses.
Mais c'est généralement exactement à ce moment-là que dans la chambre du haut j'entends des pleurs, ou bien un "fini le dodo !" J'essaie d'ignorer, de faire comme si je n'avais rien entendu, comme si c'était un voisin lointain. Mais les voix d'enfants se font un peu plus fortes. Une petite main vient s'agriper à mes genoux ou un petit visage encore embrouillé dans le sommeil se love contre moi. J'essaie de grappiller encore quelques instants, marquer à toute allure tous ces mots qui me dévorent. Mais trop tard. Les petites mains veulent jouer avec le clavier d'ordinateur, menacent d'appuyer sur une mauvaise touche qui ferait tout effacer.
A contre-coeur, je sauvegarde et j'appuie sur "Fermer l'ordinateur".
Je retrouverai mes personnages dans une semaine, peut-être deux. Lorsqu'une nouvelle sieste à la maison d'un jour non travaillé me sera offerte.
 
J'ai fini mon roman ces deux dernières semaines, sous le chant des cigales et à l'abri du soleil brûlant de Provence. Presque tous les jours, pendant les petits dodos des filles. Vive les vacances et la chaleur estivale qui rend lourd le sommeil des enfants.
 
J'ai mis le mot "FIN" qui va me permettre de penser enfin au prochain roman, à la prochaine histoire. Mais je me suis promis de ne plus écrire de cette façon - sur les pointillés, sur le temps volé, sur les heures arrachées à l'urgence du quotidien.
Je ne sais toujours pas comment trouver le temps qui me manque. Mais j'espère y arriver pour que de nouveaux personnages me fassent confiance et me choisissent pour prendre vie dans une histoire.